• Dématérialisation
  • M Jean Gasnault
  • 09/03/2022

Plan numérique de transformation de la Justice, un rapport de la Cour des comptes

Au mois de janvier, la Cour des comptes a mis en ligne un rapport portant sur le plan de transformation numérique de la justice.

Élaboré en 2017, avec un budget d’investissement de 530 millions d’euros, le plan de transformation numérique (PTN) du ministère de la justice pour 2018-2022 visait à simplifier les processus de l’institution judiciaire au bénéfice des usagers comme des professionnels de la justice et du droit, en recourant notamment à la dématérialisation des procédures.

En raison de l’ampleur de ce plan, la commission des finances du Sénat a demandé à la Cour des comptes de procéder à un point d’étape. Le rapport qui en résulte constate qu’à vouloir rattraper un retard sans suffisamment de préparation et trop de précipitation, on ait plutôt contribué à l’aggraver.

Principales critiques

Quelques phrases prises au hasard dans le rapport donnent une idée de la sévérité des conclusions : « L’ambition du projet n’a pas pu s’appuyer sur un cadrage technique rigoureux » « Grande quantité de prestataires externes, mal encadrés contractuellement et mal suivis »

La Cour des comptes expose par le détail, tour à tour, les causes de cet échec :

  • Des choix stratégiques contestables, exemple pour le projet Portalis (voir à ce sujet l’annexe 6 du rapport), « la priorité a été donnée au développement de fonctionnalités offertes au justiciable pour effectuer des saisines directes en ligne ou pour améliorer son information, alors que le préalable indispensable était de terminer la refonte d’applications civiles vieilles de trente ans. »
  • Un Suivi comptable et financier trop inégal et pas assez rigoureux.
  • Une main d’œuvre interne pas assez nombreuse, ni stable, pas assez d’implication et de formation.
  • Des interventions externes trop nombreuses et mal gérées, des acteurs privés non pénalisés en cas de livraisons trop tardives ou toujours en attente.

Le rapport insiste plusieurs fois sur des compétences inadaptées au plan informatique : défaillance du cadrage technique et cybersécurité vulnérable.

Préconisations

Parmi les préconisations de Cour des comptes - (il y en a un certain nombre) on relèvera : 

la rigueur budgétaire : « pour chaque plan adossé à des mesures budgétaires, un suivi global et par projet, tenant compte des cofinancements éventuels », et une analyse systématique de tout dépassement ;

« un renforcement interne important des compétences informatiques du ministère » et s’il y a des interventions externes mieux préparer le cahier des charges en amont ;

un schéma directeur complet, où « tous les sujets structurants aient bien été traités » ;

la nécessité durable de la formation et l’implication de TOUS les personnels concernés par cette transformation

et enfin une évaluation a posteriori des projets, « pour vérifier que les résultats obtenus sont conformes aux objectifs et, si nécessaire, identifier les actions restant à réaliser pour les atteindre, que ces actions portent sur la conduite du changement ou le réglage fin de ces outils »

Il faut espérer que ces recommandations seront suivies et qu'elles n'occasionneront pas d'autres défaillances dans le processus de dématérialisation en cours, ni qu'elles n'obligeront à d'autres délégations d'ouvrages.

 

Conclusion

 En quoi ce rapport intéresse-t-il les avocats ?

Il donne des renseignements précieux pour l’évolution de leur rôle tant vis-à-vis de la clientèle que du monde judiciaire public. Autonomie et accompagnement du justiciable : les portails ne sont pas complets et encore fort loin de suppléer à l’assistance de professionnels du droit, même au plan pédagogique. Pas d’inquiétude à avoir, le monde judiciaire a encore besoin des avocats et pour longtemps.

Les portails internes, qui doivent simplifier, sécuriser et accélérer le travail des greffiers et magistrats sont encore en chantier, certaines tranches n’ont pas été abordées. Il reste bien du travail. Celles et ceux qui aimeraient, on les lit sur les réseaux sociaux, que la e-procédure soit plus fluide et plus sure, auront hélas encore bien des messages à poster.

Dans ce document, on trouve surtout un condensé instructif des causes d’échec d’une opération de transformation numérique. D’autres structures de professionnels du droit pourraient faire un récit identique de leurs difficultés. Les recommandations de la Cour des comptes valent pour tous les professionnels de l’écosystème judicaire qui veulent progresser dans ce domaine.

 

Voir à ce sujet le commentaire de Mme Olivia Dufour, 26 janvier, Lextenso actu juridique

https://www.actu-juridique.fr/justice/la-cour-des-comptes-epingle-les-insuffisances-du-plan-de-transformation-numerique-de-la-justice/

BN BLOG Jean 

 

Partagez :

Commentaire (0)

Aucun commentaire enregistré sur cet article

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire

Déconnexion